Aujourd’hui, les dirigeants des communautés autochtones du Nouveau-Brunswick, du Québec et de l’Ontario expriment leur vive inquiétude quant à l’absence de consentement autochtone pour les déchets nucléaires, l’exploitation minière et le raffinage de l’uranium sur leurs terres ancestrales.
L’article 29(2) de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) stipule : « Les États doivent prendre des mesures efficaces pour veiller à ce qu’aucun stockage ou élimination de matières dangereuses n’ait lieu sur les terres ou territoires des peuples autochtones sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
Le gouvernement du Canada encourage l’expansion de l’énergie nucléaire dans tout le pays sans le consentement préalable, libre et éclairé des nations autochtones concernées. Comme les réacteurs existants, les nouveaux réacteurs nucléaires laisseront un héritage toxique à tous les êtres vivants pendant des milliers d’années.
Des dizaines de communautés ont déjà des sites contaminés par la radioactivité sur leurs terres, et elles doivent, comme d’autres, examiner attentivement l’impact des dépôts permanents proposés pour les déchets nucléaires sur les sept prochaines générations.
Hugh Akagi est le chef de la nation Peskotomuhkati au Canada, dont la terre natale est l’hôte involontaire de la centrale nucléaire de Point Lepreau, dans la baie de Fundy, au Nouveau-Brunswick, connue dans le monde entier. Le réacteur a été construit puis rénové sans le consentement de la nation. Aujourd’hui, les gouvernements fédéral et du Nouveau-Brunswick dépensent des fonds publics pour développer deux nouveaux réacteurs nucléaires sur le site de Point Lepreau.
Le chef Akagi a écrit à plusieurs reprises au ministre canadien de l’environnement et du changement climatique pour lui faire part de ses inquiétudes concernant les projets proposés et lui poser des questions sur les déchets de combustible nucléaire usé de haute activité stockés temporairement sur le site de Point Lepreau.
« La chaîne du combustible nucléaire – extraction de l’uranium, traitement chimique du minerai, fabrication du combustible, fission de l’uranium dans un réacteur créant des déchets radioactifs toxiques qui resteront dangereux pendant des dizaines de milliers d’années – laisse un héritage d’injustices ressenties de manière disproportionnée par les peuples autochtones et toutes nos relations, déclare le chef Akagi.
En 2021, le Grand Conseil de Wolastoq au Nouveau-Brunswick a publié une résolution sur l’énergie et les déchets nucléaires sur le territoire traditionnel de Wolastoq.
Le chef du grand conseil, Ron Tremblay, déclare : « Les Wolastoqewi-Elders définissent le nucléaire dans leur langue comme “Askomiw Sanaqak”, ce qui se traduit par “dangereux à jamais”. C’est pourquoi nous avons demandé aux Premières nations de trouver des solutions énergétiques alternatives, notamment en matière d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique, de cesser tout financement public du nucléaire et de fermer progressivement le réacteur de Point Lepreau ».
La raffinerie d’uranium de Blind River, détenue et exploitée par Cameco, est située sur des terres qui, depuis l’an 800 de notre ère, ont été le théâtre d’une occupation et d’une vie autochtones dynamiques, notamment en tant que terres ancestrales de la Première nation de Mississauga (PNM), et l’accès de la PNM à ces terres et à ces eaux a été interdit en raison des activités nucléaires de Cameco sur le site.
La Première nation de Mississauga n’a jamais consenti à ce que ces terres soient utilisées pour des activités nucléaires ou pour l’élimination de déchets radioactifs, et il n’y a toujours pas de réparation équitable pour cette perte d’accès à ses terres ancestrales situées dans le delta de Mississauga.
« L’existence d’activités nucléaires sur nos terres ancestrales a contribué à la perte de notre culture et de nos traditions spirituelles et a nui à la santé et au bien-être de notre Première nation, » a déclaré Peyton Pitawanakwat, conseiller de la Première nation de Mississauga. « Cameco a tiré et continue de tirer profit des activités de Blind River, qui demeure la plus grande raffinerie d’uranium au monde. La proposition d’implanter des déchets radioactifs sur nos terres perpétuerait une injustice environnementale existante et équivaudrait à du racisme environnemental. »
La rivière Kichi Sibi ou rivière des Outaouais, qui forme la frontière entre l’Ontario et le Québec, est un autre lieu de conflit. L’année dernière, les chefs des Premières nations Kebaowek et Kitigan Zibi Anishinabeg, au Québec, ont rendu publique leur évaluation, menée par les autochtones, d’un monticule de déchets radioactifs d’un million de mètres cubes devant être construit aux laboratoires de Chalk River, sur les rives de la Kichi Sibi, sur un territoire algonquin non cédé. Leur évaluation a porté sur l’impact du projet sur leur culture, leur terre, leur eau et leur faune. Un réacteur nucléaire expérimental est également prévu à Chalk River.
« Le Kichi Sibi est sacré pour nos peuples et se trouve au cœur de notre territoire non cédé », a déclaré le chef Lance Haymond, de la Première nation Kebaowek. « Les Algonquins n’ont jamais consenti à ce que le site de Chalk River soit utilisé pendant plus de 75 ans pour des réacteurs nucléaires et la recherche, et qu’il soit maintenant le site d’une décharge permanente de déchets radioactifs. La consultation a été beaucoup trop tardive et inadéquate, et nous rejetons le plan.
Malgré l’opposition claire de dix Premières Nations algonquines au projet, la Commission canadienne de sûreté nucléaire a approuvé l’installation de stockage à proximité de la surface en janvier 2024. Deux Premières nations, ainsi que plusieurs groupes de citoyens, ont lancé un recours en justice contre cette décision.
Le gouvernement fédéral affirme que la réconciliation est une priorité. Reste à savoir comment la DNUDPA sera respectée par le gouvernement du Canada – qui l’a signée en 2016 et a adopté la loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones en 2021.
Coalition for Responsible Energy Development (CRED-NB)
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